Choses futiles du quotidien

novembre 20th, 2009 Commentaires fermés

Ci-dessous quelques détails du quotidien qui m’étonnent parfois, sans que je saches trop s’il faut les interpréter, et si oui comment. Ce sont des détails, des petites choses futiles, des scènes du quotidien, qui se passent ici mais aussi ailleurs, et qui enrichissent, diversifient, complexifient, mon regard d’étranger sur cette société. (Note au lecteur: les © indiquent des néologismes ou des expressions déposées par l’auteur)

Dans les grands magasins, on voit des clients qui naviguent entre les rayons assis à bord de chariots qui sont en fait de vraies petites voitures, avec quatre roues et un volant, un klaxon et un phare avant. Souvent, ce sont des gens vieux ou obèses qui les conduisent. En les voyant, je me dis que ces gens sont, sans le savoir, des clichés vivants, des incarnations de la fat-Amérique©, pour nous étrangers (disons pour nous Français, ou au moins pour moi). Dans mon imaginaire, ces gens-là, à bord de leurs chariots pilotables, incarnent l’Amérique mollassonne, obèse, consumériste, celle qui se nourrit de junk-food, de sodas et de télé. Et je ne sais pas pourquoi, mais, quand ces chauffeurs sont vieux et paraissent bourrus, j’y vois des Républicains typiques, patriotes, racistes et amoureux de leurs armes. (Tout ce que je dis là peut paraître très injuste mais les impressions, comme le foot, le sont parfois.)

Image plus positive, il y a ces gens qui courent, le matin, le soir, dans la rue, dans les parcs, autour des stades. Scènes classiques, universelles, mais qui tranchent un peu avec l’image qu’on a des Américains. Une image que je retiens, c’est celle de cette femme courant autour d’un stade et poussant du bras une poussette devant elle. En voyant ce spectacle, je me dis qu’il faut beaucoup de courage et de motivation pour être une mère-joggeuse©, et que moi, je suis profondément, physiquement, presque ontologiquement, paresseux.

En cours, les élèves américains sont en moyenne très attentifs. Bien sûr, il y en a parfois qui somnolent les matins, mais les étudiants sont dans l’ensemble attentifs, sérieux. Je suis d’ailleurs étonné par leur capacité à s’intéresser à des cours ennuyeux (car oui, il y a aussi des cours ennuyeux de ce côté de l’Atlantique) et à poser des questions pointilleuses lorsque leur sens critique s’immisce dans une brèche du discours professoral (remarque auto-bashante©: cette phrase cumule longueur ET lourdeur). Je pense en fait que les étudiants américains ont une relation différente à l’enseignement supérieur que les étudiants français qui vont à l’université (communément appelés « les branleurs » par leurs cousins de prépa), comme s’ils prenaient la chose plus au sérieux parce qu’elle ne leur est pas due (vu le coût d’une année d’étude, la majorité des étudiants doivent pas mal se remuer pour avoir le droit d’étudier). En France, c’est en tout cas mon sentiment -malsain?- de privilégié, les élèves sont moins sérieux car les études supérieures paraissent presque naturelles (un droit, et non un but). Le système universitaire américain, si critiquable, a peut-être bien cette qualité-là.

Je prends tous les jours le bus (une bonne heure quotidienne en moyenne) donc il y a certains traits qui commencent à se dessiner. Outre les gens qui ne font rien, ceux qui ruminent des boules à mâcher©, et ceux qui s’enfoncent des bouchons à musique© dans les oreilles, il y a  beaucoup de gens qui lisent (surtout des gros romans américains récents, dont le flashy des couvertures nous rappelle que les livres sont des produits, qu’il faut vendre) ; il y a aussi pas mal de gens qui dorment, et d’autres qui luttent contre le sommeil (ceux-là sont généralement sauvés du côté obscur  de leur faiblesse par les coups de frein, les accélérations, ou les imperfections de la chaussée). Le dormeur du bus© peut symboliser au moins deux choses, contradictoires: le côté épuisant, oppressant, violent, de la ville, de la société, du travail, des contraintes de la vie ; ou le côté paisible, rassurant, des transports en commun, et l’absence d’hostilité forte entre les gens. Ce côté positif, on le retrouve dans les échanges entre le chauffeur et les passagers: beaucoup de politesse, des « Thank you » suivis de « You’re welcome » à chaque sortie d’usagers (ou presque), des conversations… Il faut dire cependant que, comme dans tous les bus du monde  je crois, on ne se parle pas beaucoup entre passagers ; et que chaque banquette qui se libère est l’objet de toutes les convoitises ; mais globalement, j’aime bien l’Amérique du bus.

A bientôt.

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